Toutes les histoires ne peuvent pas bien finir. Après tout la vie n’est pas un conte de fée ou chaque émoi se solde d’un amour pur et éternel et ou chaque héros possède une force de caractère si incroyable qu’elle lui permet aisément de triompher de chacune des épreuves posées en travers de son chemin. Et la jeune fille qui continue ses légers mouvements dans l’eau fraiche et pure de la source est probablement la mieux placée pour le savoir. Tout aurait du bien commencé. Tout aurait du bien finir. Ses parents auraient du se rencontrer dans la lueur éclatante d’un soleil couchant pour échanger leurs premiers regards énamourés avant de fonde dans une église pour célébrer un mariage aussi rapide que plein d’amour. Puis ils auraient élevés leur enfant dans un amour débordant….c’était ce qui aurait dû être…

Mais pour une histoire parfaite il faut avoir les parfaits héros. Et une telle chose n’existe pas, pas même chez les sidhes Seelie qui défendent pourtant becs et ongles cette idée… Lui n’était que l’amant trop faible d’une reine intransigeante et Elle une jolie noble trop naïve pour le comprendre. Pourtant alors que Cattleya se remémore une des plus récentes lettres envoyées par son fuyard de père, son cœur se serre douloureusement. Parce que cette souffrance, cette punition aucun de ces deux êtres imparfaits ne l’avait mérité.

« Je sais à quel points tu dois nous haïr ta mère et moi, pour t’avoir condamnée à cette trop longue vie maudite. Il nous est impossible de réfuter cette accusation car nous avons été trop égoïstes en souhaitant la naissance d’un enfant. Trop imprudents aussi et en agissant comme nous l’avons fait nous sommes…je suis du moins, responsable de tes malheurs. Mais du toi savoir ! Tu dois comprendre que rien n’était prévu…que rien n’était souhaité ! C’est difficile de t’expliquer ce que j’ai pu ressentir en la voyant. Elle n’était peut-être pas la plus belle, peut-être pas même la plus intelligente mais le moment ou elle m’a souri, entourée de ces orchidées et à moitié noyée par les ombres douces du soir est toujours gravé dans ma mémoire comme au premier jour. Parce qu’elle était sincère, pure et que contrairement à tout les membres de cette Cours qui n’était que mensonges et trahisons elle m’aimait vraiment. Oui…bien que cela puisse paraitre égoïste ou même horrible je l’ai aimée parce qu’elle m’aimait. Mais peut importe ce que tu peux en penser j’ai déjà bien était assez puni pour cette folie… »

Ses poings se serrent de nouveau provoquant de délicats remous dans l’eau claire. Malgré toute sa colère. Malgré toute sa rage elle n’avait rien eu à répondre à cette effusion de lettres trop honnête pour être rejetée. Trop emplie de cette souffrance contenue pour qu’elle puisse continuer à haïr paisiblement son géniteur….parce que finalement il n’avait commis qu’une seule erreur. Tomber amoureux d’une autre que la Reine Seelie…mais même Cattleya savait qu’il était impossible d’aimer cette être glacé constituée de magie pure. Trop forte. Trop inflexible. Trop inhumaine et ce même pour les sidhes qui n’avaient absolument rien en commun avec ces si fragiles mortels dont ils aimaient rire. ET puis lui était déjà si faible. Trop lâche pour l’accepter dans tout sa glorieuse splendeur. Un instant les deux orbes bleues se ferment soudain emplies de larmes.

« Même ton nom c’est de ce moment que tu le tiens. Cattleya…c’est le nom des fleurs qui nous entouraient. Et cet instant nous t’en avons fait cadeau pour que tu sache toujours que malgré nos erreurs tu est la chose la plus parfaite que nous ayons jamais réalisés. Notre enfant, notre rêve…. »

Et lentement Cattleya détourne la tête. C’était ce rêve qui les avait détruits. Car la Reine n’avait jamais rien su jusqu’au moment ou l’une de ses dames de compagnies avait pris du poids….et pour un être comme elle il avait été simple de deviner la cause de ce nouvel embonpoint et d’en trouver le responsable…Son propre amant. Alors elle avait attendu que l’enfant soit née pour tuer la femme que celui qu’elle aimait tant lui avait préféré et avait banni son ancien consort de la Cour.

Lentement ses mains se resserrent jusqu'à ce que ces ongles pénètrent dans la peau fragile de sa paume. Autour d’elle l’eau se tâche d’un rouge sombre pendant quelques secondes, souillant ainsi la pureté de la source sacré durant un bref instant. Cattleya la maudite voila ce qu’elle est réellement. Même sa naissance n’était rien d’autre qu’un immense blasphème face à l’équilibre fragile qui régnait dans les deux cours. Parce qu’elle avait dévastée la Reine…impossible de ne pas reconnaitre les deux yeux plus clairs de son amant dans le visage poupin de l’enfant de sa dame de compagnie, impossible de pas comprendre la trahison qu’il avait commise.

D’un mouvement souple Cattleya sort de l’eau consciente du fait que les deux seigneurs sidhes sont partis. C’est elle qui à tout gâché d’une certaine façon mais désormais cela importe peu. Des souvenirs diffus reviennent à la surface alors qu’elle se souvient des jardins de la Cour scintillante. Car elle y avait vécu après tout. S’avait été l’ultime punition de la Reine Seelie, puisque Cattleya aurait du être sa fille, elle le deviendrait. Et cela aurait pu marcher. Sans mère puisque la Reine avait tuée la sienne, sans père puisqu’il avait fui aussi loin qu’il le pouvait, La reine en manœuvrant bien aurait pu transformer l’enfant en une parfaite copie d’elle-même. Une princesse qui ne serait que le reflet de celle qui l’élèverait. Et même aujourd’hui Cattleya se rend compte de la chance qu’elle à eu.

Parce que même la Reine était capable d’aimer. Et que revoir ces deux lacs bleus qu’elle avait tant aimés au milieu d’un visage trop pur et trop doux pour être le sien l’avait définitivement détruite. Quelque chose qu’elle n’avait pu supporter. Une souffrance trop grande pour être surmontée. Alors à l’aube de ses cinq ans la blonde enfant avait été déposée devant le monticule Seelie. Pas de bannissement officiel qui aurait averti son père qu’il pouvait venir la chercher. Seulement un abandon cruel, la condamnant à mourir si les Unseelie ne l’acceptaient pas. Mais bien sûr ils l’avaient fait. Trop intelligents pour ne pas se rendre compte de ce que pourrait leur apporter l’enfant. Faire souffrir la Reine et la déstabiliser dès qu’elle verrait Cattleya. Voila ce qu’ils voulaient….voila pourquoi ils l’avaient adoptée.

Ni par amour ni par pitié…Simplement pour s’amuser…pour jouer.

Un sourire nostalgique fleurit sur les lèvres rosées de la jeune femme. Cette enfance atypique fut pourtant heureuse. Oui les jours avaient été durs mais elle était un objet de valeur. Un des membres de la dernière génération des sidhes, encore plus réduite que la précédente. Une enfant et par conséquent un trésor. Alors ils l’avaient veillés et protégés autant que des sidhes Unseelie pouvaient le faire. Alors pour elle l’endroit sombre et froid que tous redoutaient était devenu un foyer.

« Les murs si noirs veinés de délicats entrelacs d’argents, une main à la paume calleuse qui se tend vers elle sans une hésitation. Un visage familier au doux sourire. Un rire clair…si clair et cet amour qui semble se diffuser vers elle créant la plus belle des lumières dans la plus sombre des obscurités, effaçant ainsi les tâches de sang souillés qui parsèment la cour du Roi des Ténèbres »

Pas son père non…mais celui qu’elle aurait souhaité avoir en tout cas. L’amour et le refuge. La tendresse et la sagesse. Et pour la jeune naïve qu’elle était c’était à cet homme que son père devait ressembler. ET s’il n’avait jamais bravé l’interdiction de la Reine c’était qu’il devait avoir de grande choses à faire. Coincé dans son mirage, Cattleya se murmurait chaque soir que son père était un héros qui viendrait un jour l’emmener dans un endroit ou le soleil ne se couchait jamais. Un petit rie amer s’échappe lentement hors des lèvres de la jeune femme. Dieu qu’elle avait eu faux. ET Dieu que cela lui avait fait mal lorsqu’elle s’en était rendu compte…mais quand on lui avait dit qu’elle pourrait enfin le voir…enfin !

Ses paupières se baissent lentement sur son visage alors qu’elle sourit de l’ironie de la situation. Parce qu’il s’est avéré plus décevant que n’importe qui. Faible, égoïste, épicurien. Bien loin de l’image pure et noble d’un père sauveur qu’elle se faisait. Mais pourtant elle l’avait aimé. SI fort…du moins jusqu'à ce que la Reine apprenne les entrevues que le père et la fille partageaient …car lorsqu’elle l’avait appris sa rage incontrôlable avait secouée toute la cour scintillante et là elle avait prononcés des mots que jamais la jeune sidhe ne pourrait pardonner. Elle l’avait maudite, l’empêchant d’utiliser son corps comme ses capacités au maximum de ses pouvoirs.

La raison de sa présence en ces lieux étrangers à toute mauvaise magie. La raison pour laquelle elle sert si fidèlement le Roi Unseelie et lui transmet avec minutie toute les informations qu’elle peut glaner en jouant du violoncelle dans les rues du no man’s land. La raison pour laquelle elle fuit son père qu’elle ne sait plus aimer.

La vengeance. Dévorante et envoutante. Entêtante et déchirante.

Une vengeance qui sera accomplie peut importe le temps qu’elle devra y passer.